Quelle joie et quel enthousiasme dans la voix des membres de l’Equipe de Préparation au Mariage (CPM) ! Pourtant, aujourd’hui, accompagner des fiancés vers le sacrement du mariage n’est pas chose aisée. Comment parler de fidélité, de fécondité, de liberté, d’indissolubilité du mariage, alors que le monde contemporain ne parle que d’immédiateté, d’éphémère, d’avoir et de pouvoir, de consommation… Pourtant ce beau projet d’Église pour accompagner les fiancés est bel et bien porté par des couples chrétiens qui s’engagent auprès d’autres, avec dévouement et foi. Et cela produit des fruits multiples.
C’est par un petit mail qui leur apparaît « un peu mystérieux » que les fiancés sont invités à la préparation au mariage. « Ils arrivent parfois en traînant les pieds… Ils craignent une session de catéchisme… Nous les convions à deux dimanches successifs et cela leur demande de l’organisation. Pour certains qui ont des enfants, il faut les faire garder… », explique Aude, qui avec son mari, Pierre, fait partie de l’équipe de préparation au mariage. Pourtant, comme Rhaïssa et son mari, Kérwin, également membres de cette équipe paroissiale, elle a entendu et vu « Comme les fiancés étaient heureux à la fin de ces deux journées formidables ». C’est l’occasion de faire une pause dans l’effervescence des préparatifs du mariage… Ils sont amenés à réfléchir à leur engagement qui n’est pas une démarche anodine et gagnent une plus grande conscience de la dimension chrétienne de leur choix. L’Église est sans doute le seul lieu où ils vont pouvoir parler de leur engagement sous tous ses aspects : depuis sa dimension spirituelle -l’alliance avec Dieu- jusqu’à la dimension la plus concrète avec en particulier une intervention d’une conseillère conjugale, sexologue chrétienne, Marie-Aude Binet, qui aborde la question de la relation charnelle -question tabou s’il en est- qui sera là interrogée comme une part intrinsèque de leur mariage.
Sortir de nos enfermements
Avec délicatesse et respect, l’équipe de préparation au mariage met tout en œuvre pour que « la parole échangée soit authentique ». D’emblée sont posés les principes de confidentialité, de respect et de tolérance. « Cela les amène à se livrer comme ils ne l’ont jamais fait, nous disent-ils, ce sont des moments de grâce » racontent les accompagnateurs. Ils soulignent aussi « combien ce partage fait du bien à leur propre couple, les enrichit et les plonge dans leur propre foi .»
« Il m’est arrivée d’être surprise d’entendre parler mon mari, dire ce qu’il pense sur tel ou tel aspect du couple et cela nous permet à nous aussi de mieux nous découvrir » souligne avec joie Rhaïssa. Tandis qu’Aude confie : « On sort toujours enrichi par la très grande diversité des couples qu’on prépare ; ça permet de s’ouvrir. On est, là, en contact avec le monde et c’est drôlement riche par rapport à l’enfermement dans lequel nous sommes parfois de part nos obligations professionnelles, sociales, familiales… »
Se recentrer sur l’essentiel
Elle poursuit : « Lors de ces préparations, on entre en relation avec les autres de façon gratuite, mélangée : ça nous montre combien l’Église est multiple. De l’extérieur, on la croit monolithique, hiérarchisée, etc. Cette image ne tient pas la route ! Là, on rejoint le Christ qui s’est adressé à tous. Il y a des tas de façons d’être chrétien. Il y a des personnes très différentes. Par rapport à la foi, nous voyons aussi des parcours très différents mais au bout du compte, ces journées nous recentrent sur l’essentiel : nous sommes tous frères, non pas, parce qu’on se ressemble mais parce qu’on est tous dans la même recherche d’amour !« Dans cette fraternité vécue intensément des liens se créent, certains fiancés continuent à se voir, à communiquer… L’équipe de préparation, elle-même, portée par Anne et Nestor Aziaba, vit cet amour fraternel tout au long de l’année ce qui soutient aussi leur engagement.
Donner du sens à la vie
Au cours de ces deux dimanches, les fiancés abordent chacun des « piliers » du mariage (fidélité, fécondité, liberté, indissolubilité) et en découvrent le sens à la fois humain et spirituel. La fidélité ? Le code civil que lira le maire en parle aussi. Première idée : « Ne pas aller voir ailleurs, nous disent-ils, sourit Rhaïssa, mais là, nous leur faisons découvrir que la fidélité, c’est d’abord, la fidélité à soi-même, à ses propres engagements, la fidélité à l’autre aussi et surtout la fidélité à Dieu avec qui ils font alliance dans le mariage. C’est l’image d’un triangle -Soi, l’Autre, Dieu-, c’est très parlant !«
L’éducation des enfants ? Oui, le code civil en parle aussi. En Église, on parle plutôt de fécondité ce qui ouvre la question sur la vie, d’une façon plus globale et cohérente. Oui, ils s’engagent à aimer leurs enfants et en prendre soin. A les accueillir. Mais jusqu’où ? Que feront-ils par exemple, si grâce aux techniques médicales actuelles, ils apprennent que leur bébé ne sera pas comme les autres?
Tout n’est pas réglé d’avance
Sur cette question et bien d’autres, leur authenticité et leur liberté -un autre pilier du mariage- sont en jeu. «Nous leur demandons d’être authentiques dans le « oui » qu’ils diront à l’église. De ne pas se mentir, ni à eux-mêmes, ni à leur conjoint, ni à Dieu. Cela veut dire que tout n’est pas réglé d’avance, que si une question difficile se pose, ils aient conscience qu’ils devront y réfléchir, savoir prendre une décision avec l’appui de l’Église, de leur foi. On n’interdit pas, on ne juge pas, on leur explique que l’Église peut éclairer certains choix, que même si cela apparaît en décalage avec le monde contemporain, ça peut être salutaire pour leur couple. On rappelle le sens que l’Église donne à la vie alors qu’aujourd’hui, il y a des possibilités techniques énormes dont la finalité n’est jamais pensée ! ».
Particularité de la parole d’Église sur le mariage : l’indissolubilité. A l’heure où un couple sur trois divorce, cette dimension fait couler beaucoup d’encre et leur apparaît très importante. « ça dramatise leur démarche, souligne Aude. Et lorsqu’on arrive à leur faire comprendre que le mariage n’est pas seulement un engagement à deux mais un engagement sous le regard de Dieu, qu’ils recevront un sacrement, source de grâces multiples, nous les faisons avancer humainement et dans la foi. Cela les portera toute leur vie ».