Mes chers frères et sœurs. Il est naturel et normal que la commémoration de nos fidèles défunts provoque en nous deuil, souffrance et larmes. Hier et aujourd’hui, nous sommes allés au cimetière pour fleurir les tombes, prier et vénérer nos défunts. Avant-hier, j’ai fait un tour dans le cimetière de Castelginest, en sortant de l’église et j’ai remarqué que ce cimetière était très beau, très fleuri, en ce début du mois de novembre. Nous ne pouvons pas mettre leur amour en parenthèse, car la communion des saints nous unit à jamais grâce à Jésus qui est leur et notre Vie.
Qu’on le veuille ou non, la célébration des fidèles défunts est un peu une épreuve, qui fait revivre, d’une certaine manière le deuil, la douleur de la perte et de la séparation d’avec les personnes que nous aimons. Nous revivons le deuil des souvenirs vécus et laissés, le sens de la culpabilité, comme ces parents qui ont perdu leur enfant de 21 ans dans un accident de circulation, ou ceux qui ont perdu un proche qui s’est suicidé, ou simplement parce que nous nous posons la question de ce que nous avions fait ou pas fait envers nos proches décédés, deuil des joies que nous leur avons données ou qu’ils nous ont procurées pendant leur vie.
Pourtant, malgré la douleur, notre foi chrétienne nous rappelle, à cette occasion que nous sommes tous des citoyens du ciel car nous sommes disciples du Ressuscité, qui est monté au Ciel à l’Ascension. Il nous y a précédés et nous y attend, Lui qui siège à la droite du Père. Notre corps peut bien se reposer dans cette terre d’où nous avons été tirés, dans cette boue que Dieu a utilisée pour nous modeler avant de nous donner le souffle de Vie… mais nous sommes appelés à vivre avec le Christ, Dieu fait homme, mort sur la croix mais ressuscité, c’est-à-dire, toujours et éternellement vivant. C’est cette espérance dans une joie et une vie éternelles, même pour nos pauvres corps mortels, qui nous permet de recommander nos morts au Christ Ressuscité, aujourd’hui, et chaque fois que nous prions pour eux, que demandons des messes pour eux.
Nous constatons tous une évidence. L’être humain, même le chrétien, n’aime pas quitter ce monde quand les choses vont très bien pour lui. Nous nous accrochons à ce bonheur que le monde nous offre. Cependant, il suffit que les choses tournent mal, par exemple à cause d’une maladie grave, une souffrance physique ou morale, une rupture amoureuse, le chômage, la perte du travail, une grosse déception… pour désirer précipiter notre mort, quitter ce monde que nous qualifions « d’enfer » pour anticiper notre rencontre avec le Seigneur. C’est Madeleine Chedin qui me disait, à quelques jours de sa mort, pourquoi il fallait tant souffrir pour rencontrer le Seigneur et elle avait hâte de mourir, pour mettre fin à ses souffrances, et aussi pour poser directement et en face à Jésus les questions auxquelles elle n’a pas pu trouver de réponse pendant sa vie terrestre… On ne peut minimiser le poids de la douleur liée à l’âge, la maladie, la solitude… Même Jésus, nous voyons que même lui a été angoissé : il a porté le poids de la tristesse, la solitude et l’abandon dans sa passion et sa mort. Rappelons-nous qu’il a même demandé au Père d’éloigner de lui le calice de la douleur et de la passion, même s’il s’est abandonné à faire la volonté du Père jusqu’au bout.
La mort de Jésus sur la croix est ce qui donne toute sa signification à la mort de tout homme vivant en ce monde. Mais, le chrétien ne peut pas parler de la mort en la séparant de la Résurrection. La foi chrétienne est fondée dans la Résurrection. Saint Paul nous dit que « Si le Christ n’est pas ressuscité, vaine serait notre foi et nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes » ; la mort qui n’aura jamais le dernier mot sur notre vie. Mort, où est ta victoire ? Le Christ t’a vaincue, car, comme nous le rappelle encore saint Paul « même la mort ne peut nous séparer de l’Amour du Christ ».
Rappelons-nous cela en ce jour où nous commémorons les fidèles défunts. Rappelons-nous, de manière indélébile que nous avons beaucoup de chance, nous autres chrétiens. C’est une chance exceptionnelle de savoir que même la mort ne peut me séparer de l’Amour de ce Dieu qui nous a créés, nous a fait devenir ses enfants en Jésus, dans la foi et par le baptême, un Dieu qui nous attend près de lui après notre pèlerinage ici-bas. Jésus lui-même rappelle que la volonté de son Père, c’est qu’il ne perde aucun de ses enfants, mais qu’il les ressuscite tous pour la Vie éternelle. Or la vie éternelle consiste déjà dans la foi en Jésus. Redisons au Christ, malgré la douleur du deuil, notre notre joie de lui appartenir, Lui qui nous donne la Vie éternelle. C’est à lui que nous confions nos chers défunts pour que ces derniers contemplent son Visage, en attendant d’aller les retrouver un jour. Prenons un petit moment de prière personnelle pendant lequel chacun de nous va recommander, dans le silence de son cœur, les défunts que nous portons ce soir. Amen.