Je me souviens autrefois avoir lu une revue chrétienne Fêtes et Saisons dont le titre unique sur la couverture était « Les paroles dures de l’Évangile » Il faut le comprendre comme les paroles exigeantes de l’Évangile, des paroles rudes à mettre en pratique, je pense que le début du passage de l’Évangile que nous venons d’entendre maintenant pourrait y figurer.
Déjà dimanche dernier une phrase de l’Évangile de St Luc pouvait nous faire réfléchir par sa justesse : « Quel malheur pour vous lorsque tous les hommes disent du bien de vous » (Luc 6, 26). La vie des saints est là pour nous prouver combien durant leur vie, ils durent affronter leurs ennemis. Nous venons de fêter hier Ste Bernadette de LOURDES, elle fut en butte à tant de critiques après les apparitions et à Nevers dans sa communauté ce ne fut pas facile non plus ; ce qui n’empêche pas les saints déjà de goûter aux Béatitudes que vous avez entendues dimanche dernier.
Revenons à la page d’Évangile que l’Église nous offre aujourd’hui et qui est la suite de dimanche dernier. Devant ces disciples, le Christ proclame des attitudes qui vont à l’encontre de l’opinion du monde. Il nous demande d’aimer du même amour que Dieu nous aime : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient (qui disent des choses fausses sur vous). A celui qui te prend ton manteau, ne refuse pas ta tunique. Donne à quiconque te demande, et à qui prend ton bien, ne le réclame pas » (Luc 6, 27-30). « A celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue » (Luc 6, 29). Cette dernière phrase fait scandale, pour des non chrétiens. Et pourtant, tendre l’autre joue peux désarmer l’ennemi et désamorcer son agressivité.
Par contre si nous voulons suivre l’opinion commune, pratiquez une religion molle, de « bisounours », là où le sel s’affadit. « Aimez seulement ceux qui nous aiment » « Faire du bien à ceux qui vous en font » « prêter à ceux dont vous espérez en retour » (Luc 6, 32-34) Le Christ nous dit bien que les pêcheurs en font autant. Mais alors me direz-vous, ce programme évangélique de Jésus est irréalisable ! Il dépasse nos forces humaines ! C’est impossible, nous cédons au découragement. Oui, c’est impossible aux hommes à réaliser sans la grâce de Dieu. Impossible à réaliser sans s’ouvrir à la force que nous donne le Seigneur.
Jésus a apporté au monde un commandement nouveau : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé » (Jn 19,12). L’amour forme la trame de l’Évangile d’aujourd’hui. « Je vous le dis, à vous qui m’écoutez : aimez vos ennemis » (Luc 6,27). Cela nous est répété deux fois dans le texte. L’amour dont parle Jésus dépasse les limites de la famille, du cercle des amis, ou des personnes agréables que nous côtoyons. Un amour qui n’est pas seulement un sentiment mais qui s’accomplit dans des gestes concrets : souhaitez du bien, priez, donner, pardonner. La figure de l’ennemi dont nous parle St Luc est pour ainsi dire quotidienne, normale, il ne s’agit pas du persécuteur mais plus simplement de celui qui parle mal de nous, qui nous déteste et nous maltraite. Cet amour de l’ennemi est dans la gratuité, souvent il n’y aura pas réciprocité.
Pour illustrer cet amour des ennemis, deux exemples nous sont donnés :
Dans la première lecture : Nous voyons que David ne cède pas à la vengeance. Il est la victime de la folle jalousie du roi Saül qui avec trois mille hommes veux le traquer dans le désert. Saül veux le tuer. David surprend tout le monde par son attitude. Pourquoi David épargne-t-il Saül ? Sa raison c’est le Choix de Dieu « Je n’ai pas voulu porter la main sur le roi, qui a reçu l’onction de Dieu ». Le roi Saül sera touché par le geste de David qui l’a épargné et il va changer d’attitude à son égard.
Le second exemple c’est lors du procès de l’assassinat du père Hamel qui a lieu ces jours-ci à Paris et que relate Aletaia. Le témoignage d’un des survivants de cette tuerie, un laïc de 92 ans Guy Coponet, a bouleversé les magistrats et les avocats de la cour d’Assise. À la question du président de la cour d’assise qui lui demande : « qu’attendez-vous de ce procès en vous constituant partie civile ? » Guy Coponet répond sans détours : « que ceux qui ont donné des ordres, que ceux qui ont formé ceux qui sont venus, que ces gens-là viennent demander pardon à tous ceux à qui ils ont fait de la peine. Ce serait un tel rétablissement de communautés. Quand on ne pardonne pas, cela devient de la haine. C’est invivable » Et hier nous apprenons qu’un des accusés a demandé sincèrement pardon.
Prions au cours de cette messe, pour que le Seigneur nous donne la grâce de pardonner à nos ennemis et d’accueillir leur pardon quand ils l’expriment.
Et prions pour nos futurs baptisés Jessica et Mickaël. Par le baptême qu’ils recevront un jour, que le Seigneur leur ouvre un beau chemin de liberté et de vie.